Cette usine fut la plus vaste et la plus haute bâtisse industrielle implantée au cœur même de Giromagny, construction voulue par les propriétaires et fondateurs du textile au Nord du Territoire de Belfort, la famille Boigeol. Une main d’œuvre importante et peu exigeante, des industriels conquis d’avance, il devenait alors évident qu’une filature puisse s’installer à Giromagny où l’on pouvait tirer parti de l’énergie hydraulique de la Savoureuse. Les installations hydrauliques achevées dès l’automne 1813 rendent opérationnelle cette filature mécanique. Dès la première année elle occupe déjà 33 ouvriers sur des métiers à filer mécaniques.
Durant 50 années, cette usine connaîtra des transformations et des agrandissements successifs.
Cette machine à vapeur était de type vertical à balancier avec deux cylindres moteurs, à détente variable. D’une puissance nominale de 12 HP, elle provient des ateliers parisiens du constructeur “Scipion Périer et Cie”.
A l’automne 1834, la nouvelle extension de la filature franchit la Savoureuse en s’appuyant sur une voûte faite de solides pierres de taille. Une seconde machine à vapeur, construite par les ateliers de Chaillot, travaillera en parallèle avec la précédente.
Dès 1862, on recense cinq usines textiles dans le canton appartenant à Ferdinand Boigeol. conseiller général et maire de Giromagny il fournit à cette époque dans ses usines du travail à 1 579 personnes ; c’est l’employeur le plus important du canton. En 1863 la Grande fabrique de Giromagny possède : deux machines à vapeur de chacune 40 HP, une machine à vapeur de 60 HP et trois turbines hydrauliques d'une puissance totale de 65,5 HP.
Le 31 Mai 1878 une étincelle déclenche l’embrasement total de l’usine. Equipée de plus de 400 métiers à tisser, elle occupait 311 ouvriers.
Au début de la mécanisation du textile, les industriels prenaient soin de bâtir leurs fabriques à proximité des cours d’eau, afin d’en tirer l’énergie hydraulique pour mettre en mouvement des turbines. Les fabriques de Giromagny et de Lepuix-Gy dépendaient la Savoureuse.
Les ateliers de Lepuix-Gy étaient alimentés dans un premier temps par deux turbines couplées d’une puissance totale de 20 HP. Les hivers neigeux assuraient un débit suffisamment important pour tirer le maximum de puissance des turbines. Par contre, les étés chauds et secs exigeaient parfois un arrêt total et indéterminé de toute activité au sein de la fabrique.
L’année 1904 marque un tournant décisif pour la firme jusqu’alors tributaire exclusivement des caprices de la rivière. L’usinier décide l’acquisition d’une machine à vapeur de type Frickart et fait édifier une chaudière et une grande cheminée carrée de tirage. D’une puissance nominale de 150 CH, elle fut construite à La Madeleine-les-Lille à la fin du XIXe siècle. Couplée avec les turbines l’hiver afin d’économiser du charbon, elle pouvait, à elle seule, assurer le fonctionnement de l’ensemble des métiers à tisser. Si son rendement semble faible (20% à 30%), cette machine à vapeur reste, de manière incontestable, associée à une véritable révolution technique.
En 1957, la fabrique installe l’électricité grâce à la proximité de la centrale électrique des Houillères de Ronchamp. Cette nouvelle énergie marquera l’amélioration des conditions de travail avec en particulier l’installation du chauffage et un nouvel éclairage. Les turbines, alors productrices d’énergie mécanique, entraînent un alternateur qui produit du courant pour les machines électriques et les besoins annexes. 430 métiers à tisser seront désormais alimentés par cette nouvelle source d’énergie.
La mécanisation a poussé les ingénieurs à innover dans les énergies afin d’assurer de meilleurs rendements. A Lepuix-Gy, l’industrie du textile a contribué, pendant une longue période, à l’essor économique de la région belfortaine .
Aujourd’hui, le site renferme de rares vestiges de cette industrie disparue : une machine à vapeur, des métiers à tisser, des machines de maintenance ou encore une magnifique cheminée de tirage quadrangulaire. Le site est actuellement à l’état d’abandon dans l’attente d’un projet de valorisation.