Située à neuf kilomètres de Villersexel, la fonderie de Fallon est l’une des très anciennes usines du département de la Haute–Saône. La fabrication d’un haut fourneau fut autorisée par lettres patentes dès 1692. Elle profite d’un site parfaitement adapté à son installation. La présence d’un grand étang encore visible recueillant les eaux de plusieurs ruisseaux, fournissant la force motrice nécessaire pour actionner la roue à aubes et celle d’un minerai abondant et riche exploité dans des minières toutes proches.
Sous l’ancien régime, l’usine est détenue par des seigneurs de la terre de Fallon, la famille de Raincourt, qui en confie l’exploitation à des fermiers. Le haut fourneau permet alors la production, pour l’artillerie, de munitions de guerre, des bombes pour mortier et des boulets de différents calibres. En parallèle, Fallon produit des sableries et des fourneaux. En 1790, des poêles de cette commune commencent à équiper les logements des ouvriers des forges d’Audincourt et de Chagey. C’est alors que la production totale de la fonderie avoisine alors les 500 tonnes par an.
Elle est, en effet, dès 1820, l’une des premières fonderies à se procurer un fourneau à la Wilkinson permettant une seconde fusion des fontes. Cette production dépasse alors 250 tonnes. Huit années plus tard et déjé 380 tonnes de fontes façonnées par douze mouleurs sortent des murs de l’usine chaque année. De plus, une machine à vapeur est installée afin de pallier les effets des sécheresses et d’augmenter le roulement du haut fourneau. Il est alors facile de remarquer que la qualité de ses fabrications est déjà très appréciée.
Entre 1840 et 1860, le propriétaire de la fonderie de Fallon, le marquis de Raincourt ainsi que son directeur Legrand, très actifs, déposent plusieurs brevets d’invention pour la création et le perfectionnement d’appareils de chauffage et de cuisson. On note qu’il est question d’un poêle économique et de fourneaux potagers en 1840, de cheminées en 1851 et d’un fourneau à quatre marmites l’année suivante.
L’usine de Fallon permet aussi l’installation de tuyaux pour conduite d’eau chaude dans toute la région et dans le départemen voisin du Doubs. En 1845, ses débouchés se situent principalement en Alsace avec 280 tonnes, dans le Doubs avec 170 tonnes, dans le Jura et enfin les alentours de Lyon. Parallèlement, son réseau commercial se développe, un dépôt est mis sur pied à Paris et des représentants sillonnent toute la France… Il s’agit donc bien d’une production industrielle que l’on retrouve dans ses catalogues successifs : de fourneaux et marmites modèles réduits qui pouvaient servir d’échantillon pour les voyageurs de commerce, dans les «vitrines» des quincailleries et enfin de jouets pour enfants.
Les premiers catalogues présentent une production riche et variée qui englobent la fabrication de fourneaux de toutes sortes et de toutes tailles, de grandes croisées en fonte d’une incroyable légèreté et fort élégantes, des services de table en fonte douce… On y découvre également que, vers 1850, Fallon produisait de la fonte ornementale telle que des dauphins ou encore des fontaines cannelées.
Cependant, victime à son tour de la grande crise, le haut fourneau met fin à son activité vers 1870. La fonderie se procure alors ses fontes en Lorraine, essentiellement, et plus précisément à Longwy. Néanmoins, ce n’est pas pour autant que la renommée de ses produits est mise en doute puisque ses ventes continuent de s’effectuer dans toute la France et même à l’étranger Un article, extrait d’une publicité, de la fin du XIXe siècle atteste même qu’ «ils sont très appréciés pour la belle couleur de leur fonte, la perfection de leur modelage et de leur moulage.
En 1893, pour la première fois en Haute–Saône, un four à émailler (d’une capacité de 500 kg pour douze heures de fonctionnement) équipe les locaux de la fonderie de Fallon. Avec la construction de cette émaillerie, il s’agit à nouveau d’une belle prouesse technologique et commerciale . Dans cette perspective, le marquis de Raincourt et le directeur Prudhomme décident d’améliorer le procédé. En effet, des émaux de première qualité sont choisis permettant «une résistance absolue aux chocs et à la chaleur et une riche décoration très variée par le nombre et l’éclat des émaux ».